Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/41

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Ils étaient en présence du Souverain-Pontife.

Pie IX, Mastaï Ferretti, était, à cette époque, dans la trentième année de son règne et venait d’atteindre quatre-vingt-quatre ans ; mais, grâce à sa sobriété, à ses mœurs austères, à la régularité de sa vie, il avait conservé une rare vigueur, toute sa lucidité, son esprit vif, plein d’à-propos et de saillies, et cette facilité d’improvisation dont il avait donné tant de preuves pendant sa lutte contre ce qu’il appelait le dangereux libéralisme de l’Église.

Sa haute taille était à peine courbée par la vieillesse, et les rides profondes qui sillonnaient son visage plein et légèrement coloré n’en altéraient pas l’expression intelligente et fine. Il marchait encore droit et ferme, lorsqu’il sortait de son appartement pour aller recevoir, dans la salle Clémentine, les pèlerins qui venaient à lui de toutes les parties du monde, simple, peut-être même trop simple dans ses vêtements, ne sacrifiant qu’à un seul goût, l’usage du tabac à priser, dont sa soutane de soie blanche, sa ceinture rouge aux agrafes d’or et son rochet de lin portaient parfois des traces, mais néanmoins rempli de dignité, lorsqu’il donnait, avec une grâce infinie, sa main ou plutôt son anneau à baiser à ceux qui s’agenouillaient devant lui pour recevoir sa bénédiction.

Et certes, rien dans sa physionomie, dans son sourire, dans la limpidité de son regard n’expliquait cette réputation ridicule de jettatore, que quelques mauvais plaisants italiens s’efforçaient de lui donner.

C’était toujours l’énergique partisan de l’absolu-