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Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/80

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— Hélas ! malheureusement je n’ai rien de grave à reprocher à mon mari, sauf de m’avoir épousée à un âge et dans des conditions où je n’étais pas maîtresse de ma volonté.

— Est-ce que cela ne suffit pas ? De plus, tu ne l’aimes pas. Laisse-moi faire, je lui écrirai tout ce qu’il faut ! Si c’est un honnête homme, il comprendra.

— Mais mon père ? Il viendra me chercher lui-même.

— M. de Tiessant m’a mise à la porte de chez lui ; jamais il n’osera venir ici. Oh ! il ne me fait pas peur ! D’ailleurs, je veux consulter un grand avocat qui était l’ami de M. Bertin et m’est resté absolument dévoué : Me Mansart. Nous lui dirons tout, tout ! C’est un savant, il trouvera le moyen de rompre ton mariage. Je vais le prier, par un mot, de venir demain. Voyons, essuie tes beaux yeux, calme-toi ! Tu ne veux pas devenir laide ? Tiens, voilà M. Robert qui t’appelle ! Il a soif et se soucie bien que sa mère ait du chagrin ! Déjà égoïste, à un an ! Il faut me sevrer ce petit bonhomme-là au plus vite.

Le bébé venait de se réveiller en jetant des cris perçants. Éva courut au berceau, prit l’enfant sur ses genoux, lui donna à boire, et, cela fait, se mit à le bercer, en fredonnant, de sa voix fraîche et pure, une de ces complaintes naïves qui prennent, en passant par les lèvres des mères, tant de poésie.

Mme Bertin fixait sa nièce avec tendresse, et quand elle l’eut longtemps regardée, en la voyant si jolie,