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l’Église. Origène (vers 230) met le Cohélet, sans réserve ni distinction, parmi les livres sacrés. Vers 250, Denys d’Alexandrie le commente[1]. Plus tard, Jean Chrysostôme en tire d’éloquentes paroles, au lendemain de la disgrâce d’Eutrope, et, au moment de la chute de Rome, saint Jérôme le lit à sainte Blésille pour la consoler en lui montrant combien ici-bas tout est vanité[2].

L'exégèse grossière et puérile du moyen âge ne se soucia d'aucune des difficultés que le livre devait présenter à quiconque eût réfléchi. Grotius le premier avoua le scandale que lui causaient certains passages. Il aperçut très bien aussi que la langue était postérieure à la captivité. Van der Palm, Umbreit, Knobel, Herzfeld, Luzzalto, Jahn, Augusti, de Wette, virent le scepticisme de l'auteur, mais ne se l'expliquèrent pas. Une idée très fausse, celle d'un dialogue où tour à tour un piétiste et un sadducéen exposaient des idées contraires, fit un moment fortune. M. Hilzig et M. Ewald ouvrirent la voie des explications historiques, mais méconnurent le caractère de libre pensée qui domine le livre, et le faussèrent tout à fait en prétendant y trouver un transcendentalisme prétentieux. Cohélet fut pour eux une sorte de théologien à la façon de Zurich ou de Gœttingue, procédant par pédantes circonvolutions. M. Ewald et M. Hilzig, cependant, firent faire un véritable progrès à l'exé-

  1. Pitra, Spicil, Solesm., I.
  2. Ut eam ad contemptum istius seculi provocarem et omne quod in mundo cerneret putaret esse pro nihilo. Prœf, in Eccl, ad Paulam et Eust, Opp, t. II. Martianay.