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Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/106

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« Pais mes brebis[1]. » Une autre fois, Pierre fit à Jean la confidence d’un songe étrange. Il avait rêvé qu’il se promenait avec le maître. Jean venait par derrière à quelques pas. Jésus lui parla en termes très-obscurs, qui semblaient lui annoncer la prison ou une mort violente, et lui répéta à diverses reprises : « Suis-moi. » Pierre alors, montrant du doigt Jean qui les suivait, demanda ; « Seigneur, et celui-là ? — Celui-là, dit Jésus, si je veux qu’il reste, jusqu’à ce que je vienne, que t’importe ? Suis-moi. » Après le supplice de Pierre, Jean se rappela ce rêve, et y vit une prédiction du genre de mort de son ami. Il le raconta à ses disciples ; ceux-ci crurent y trouver l’assurance que leur maître ne mourrait pas avant l’avènement final de Jésus[2].

Ces grands rêves mélancoliques, ces entretiens sans cesse interrompus et recommencés avec le mort chéri remplissaient les jours et les mois. La sympathie de la Galilée pour le prophète que les Hiérosolymites avaient mis à mort s’était réveillée. Plus de cinq cents personnes étaient déjà groupées autour du souvenir de Jésus[3]. À défaut du maître perdu,

  1. Jean, xxi, 15 et suiv.
  2. Ibid.. xxi, 18 et suiv.
  3. I Cor., xv, 6.