Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/202

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au bien-être des prolétaires semble du communisme. Quand un homme meurt de faim, quand des classes entières languissent dans la misère, la politique se borne à trouver que cela est fâcheux. Elle montre fort bien qu’il n’y a d’ordre civil et politique qu’avec la liberté ; or, la conséquence de la liberté est que celui qui n’a rien et qui ne peut rien gagner meure de faim. Cela est logique ; mais rien ne tient contre l’abus de la logique. Les besoins de la classe la plus nombreuse finissent toujours par l’emporter. Des institutions purement politiques et civiles ne suffisent pas ; les aspirations sociales et religieuses ont droit aussi à une légitime satisfaction.

La gloire du peuple juif est d’avoir proclamé avec éclat ce principe, d’où est sortie la ruine des États anciens, et qu’on ne déracinera plus. La loi juive est sociale et non politique ; les prophètes, les auteurs d’apocalypses sont des promoteurs de révolutions sociales, non de révolutions politiques. Dans la première moitié du premier siècle, mis en présence de la civilisation profane, les Juifs n’ont qu’une idée, c’est de refuser les bienfaits du droit romain, de ce droit philosophique, athée, égal pour tous, et de proclamer l’excellence de leur loi théocratique, qui forme une société religieuse et morale. La Loi fait le bonheur, voilà l’idée de tous les penseurs juifs,