Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/21

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narrateur qui dit « nous » aurait son style, ses expressions à part[1] ; il serait plus paulinien que le rédacteur général. Or, cela n’est pas ; l’ouvrage présente une parfaite homogénéité.

On s’étonnera peut-être qu’une thèse en apparence si évidente ait rencontré des contradicteurs. Mais la critique des écrits du Nouveau Testament offre beaucoup de ces clartés qu’on trouve, à l’examen, pleines d’incertitudes. Sous le rapport du style, des pensées, des doctrines, les Actes ne sont guère ce qu’on attendrait d’un disciple de Paul. Ils ne ressemblent en rien aux épîtres de ce dernier. Pas une trace des fières doctrines qui font l’originalité de l’apôtre des gentils. Le tempérament de Paul est celui d’un protestant roide et personnel ; l’auteur des Actes nous fait reflet d’un bon catholique, docile, optimiste, appelant chaque prêtre « un saint prêtre », chaque évêque « un grand évêque », prêt à embrasser toutes les fictions plutôt que de reconnaître que ces saints prêtres, ces grands évêques se disputent et se font parfois une rude guerre. Tout en professant pour Paul une grande admiration, l’auteur des Actes évite

  1. On sait que, chez les écrivains du Nouveau Testament, la pauvreté d’expression est grande, si bien que chacun a son petit dictionnaire à part. De là une règle précieuse pour déterminer l’auteur d’écrits même très-courts.