Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/357

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en général, l’établissement de l’Église. On dirait une traînée de poudre, ou mieux encore une sorte de chaîne électrique, le long de laquelle l’idée nouvelle courut d’une façon presque instantanée.

Depuis cent cinquante ans, en effet, le judaïsme, jusque-là borné à l’Orient et à l’Égypte, avait pris son vol vers l’Occident. Cyrène, Chypre, l’Asie Mineure, certaines villes de Macédoine et de Grèce, l’Italie, avaient des juiveries importantes[1]. Les juifs donnaient le premier exemple de ce genre de patriotisme que les Parsis, les Arméniens et, jusqu’à un certain point, les Grecs modernes devaient montrer plus tard ; patriotisme extrêmement énergique, quoique non attaché à un sol déterminé ; patriotisme de marchands répandus partout, se reconnaissant partout pour frères ; patriotisme aboutissant à former non de grands États compactes, mais de petites communautés autonomes au sein des autres États. Fortement associés entre eux, ces juifs de la dispersion constituaient dans les villes des congrégations presque indépendantes, ayant leurs magistrats, leurs conseils. Dans certaines villes, ils avaient un ethnarque ou alabarque, investi de droits presque souverains. Ils habitaient des quartiers à

  1. Cicéron, Pro Flacco, 28 ; Philon, In Flaccum, § 7 ; Leg. ad Caium, § 36 ; Act., ii, 5-11 ; vi, 9 ; Corp. inscr. gr., no 5361.