Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/394

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privée et close dans l’enceinte de la maison. Le théâtre avait hérité de l’agora et du forum. L’anathème jeté sur le théâtre rejaillit sur toute la société. Une rivalité profonde s’établit entre l’église, d’une part, les jeux publics de l’autre. L’esclave, chassé des jeux, se porta à l’église. Je ne me suis jamais assis dans ces mornes arènes, qui sont toujours le reste le mieux conservé d’une ville antique, sans y avoir vu en esprit la lutte des deux mondes : — ici l’honnête pauvre homme, déjà à demi chrétien, assis au dernier rang, se voilant la face et sortant indigné, — là un philosophe se levant tout à coup et reprochant à la foule sa bassesse[1]. Ces exemples étaient rares au premier siècle. Cependant la protestation commençait à se faire entendre[2]. Le théâtre devenait un lieu fort décrié[3].

La législation et les règles administratives de l’Empire étaient encore un véritable chaos. Le despotisme central, les franchises municipales et provinciales, le caprice des gouverneurs, les violences des com-

  1. Dion Cassius, LXVI, 15.
  2. Voir surtout Ælius Aristide, traité contre la comédie (I, p. 751 et suiv., édit. Dindorf).
  3. Il est remarquable que, dans plusieurs villes d’Asie Mineure, les restes des théâtres antiques sont encore aujourd’hui des repaires de prostitution. Comp. Ovide, Art d’aimer, I, 89 et suiv.