Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/107

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naires romains. On pouvait bien au fond tenir ces magistrats pour suppôts de Satan, puisqu’ils protégeaient l’idolâtrie et qu’ils étaient les soutiens d’un monde livré à Satan[1] ; mais, dans la pratique, les frères étaient pour eux pleins de respect. La faction ébionite seule partageait les sentiments exaltés des zélotes et autres fanatiques de Judée. Les apôtres, en politique, se montrent à nous comme essentiellement conservateurs et légitimistes. Loin de pousser l’esclave à la révolte, ils veulent que l’esclave soit soumis au maître, même le plus injuste et le plus dur, comme s’il servait Jésus-Christ en personne, et cela non par nécessité, pour échapper aux châtiments, mais par conscience, parce que Dieu le veut. Derrière le maître, il y a Dieu lui-même. L’esclavage était si loin de paraître contre nature, que les chrétiens avaient des esclaves, et des esclaves chrétiens[2]. Nous avons vu Paul réprimer la tendance aux soulèvements politiques qui se manifestait vers l’an 57, prêcher aux fidèles de Rome et sans doute de bien d’autres Églises la soumission aux puissances, quelle que soit leur origine, établir en principe que le gendarme est un ministre de Dieu et qu’il n’y a que les

  1. Luc, iv, 6 ; Jean, xii, 31 ; Eph., vi, 12.
  2. I Petri, ii, 18 ; Col., iii, 22, 25 ; iv, 1 ; Eph., vi, 5 et suiv., et l’épisode d’Onésime.