Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/36

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où l’ouvrage fut écrit se laisse aussi entrevoir avec probabilité. La question de l’auteur du livre est sujette à de bien plus grandes incertitudes. Sur ce point, on ne peut, selon moi, s’exprimer avec une pleine assurance. L’auteur se nomme lui-même en tête du livre (i, 9)[1] : « Moi, Jean, votre frère et votre compagnon de persécution, de royauté et de patience en Christ. » Mais deux questions se posent ici : 1o l’allégation est-elle sincère, ou bien ne serait-elle pas une de ces fraudes pieuses dont tous les auteurs d’apocalypses sans exception se sont rendus coupables ? Le livre, en d’autres termes, ne serait-il pas d’un inconnu, qui aurait prêté à un homme de premier ordre dans l’opinion des Églises, à Jean l’apôtre, une vision conforme à ses propres idées ? — 2o Étant admis que le verset 9 du chapitre i de l’Apocalypse soit sincère, ce Jean ne serait-il pas un homonyme de l’apôtre ?

Discutons d’abord cette seconde hypothèse ; car c’est la plus facile à écarter. Le Jean qui parle ou qui est censé parler dans l’Apocalypse s’exprime avec tant de vigueur, il suppose si nettement qu’on le connaît et qu’on n’a pas de difficulté à le distinguer de ses homonymes[2], il sait si bien les secrets des Églises, il y entre d’un air si résolu, qu’on ne peut

  1. Comp. Apoc., i, 4, et xxii, 8. Cf. i, 1-2.
  2. Apoc., xxii, 8.