Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/146

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de pédantisme, dont n’est guère capable le docteur solennel. Les bouddhistes et les agadistes juifs (les évangélistes sont de vrais agadistes) ont seuls possédé cet art au degré de perfection qui fait accepter un récit à l’univers entier. Tous les contes, toutes les paraboles qui se répètent d’un bout de la terre à l’autre n’ont que deux origines, l’une bouddhique, l’autre chrétienne, parce que seuls les bouddhistes et les fondateurs du christianisme eurent souci de la prédication populaire. La situation des bouddhistes relativement aux brahmanes avait quelque chose d’analogue à celle des agadistes relativement aux talmudistes. Les talmudistes n’ont rien qui ressemble à la parabole évangélique, pas plus que les brahmanes ne fussent arrivés d’eux-mêmes au tour si agile, si leste, si coulant de la narration bouddhique. Deux grandes vies divines bien racontées, celle de Bouddha, celle de Jésus, voilà le secret des deux plus vastes propagandes religieuses qu’ait vues l’humanité.

La halaka n’a converti personne ; seules, les épîtres de saint Paul n’eussent pas acquis cent adeptes à Jésus. Ce qui a conquis les cœurs, c’est l’Évangile, ce délicieux mélange de poésie et de sens moral, ce récit flottant entre le rêve et la réalité dans un paradis où l’on ne mesure pas le temps. Il y a eu sûrement en tout cela un peu de surprise littéraire. Il