Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/454

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phie, devenaient à la mode. Apollonius de Tyane en donnait le premier exemple, quoiqu’il soit difficile de dire ce que fut en réalité ce singulier personnage. C’est plus tard qu’on prétendit en faire un révélateur religieux, une sorte de demi-dieu philosophe[1]. Telle était la promptitude de la décadence de l’esprit humain qu’un théurge misérable qui, à l’époque de Trajan, n’eut de vogue que parmi les badauds de l’Asie Mineure, devenait cent ans après, grâce à des écrivains sans vergogne, qui s’emparèrent de lui pour amuser un public devenu totalement crédule, un personnage de premier ordre, une incarnation divine, que l’on osa comparer à Jésus[2].

L’instruction publique obtenait des empereurs bien plus d’attention que sous les Césars et même que sous les Flavius[3] ; mais il n’y était question que

  1. Si Apollonius de Tyane avait été un homme sérieux, nous le connaîtrions par Pline, Suétone, Aulu-Gelle, etc., comme nous connaissons Euphrate, Musonius et d’autres philosophes, dont Philostrate a changé la physionomie véritable pour les accommoder au goût de son public. Lucien (Alexander, 5) et Apulée (De magia, 90) parlent déjà d’Apollonius d’après des récits romanesques, probablement d’après l’écrit du prétendu Mœragène (Philostr., Apoll., I, iii, 2 ; Origène, Contre Celse, VI, 41). Dans ces écrits, Apollonius avait simplement le caractère d’un magicien, d’un charlatan visant à l’effet.
  2. Lampride, Alex. Sev., 29.
  3. Voir les Apôtres, p. 329. Pour Adrien, voir Spartien, Adr., 16 ; Aurelius Victor, Cæs. xiv, 2, 3.