Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/587

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mérés par Marc et Matthieu comme frères de Jésus étaient en réalité ses cousins-germains, fils de Marie Cléophas. Mais cela est inadmissible[1]. Beaucoup d’autres passages supposent que Jésus eut de vrais frères et de vraies sœurs. L’agencement de la petite scène racontée par Matthieu (xiii, 54 et suiv.) et Marc (vi, 2 et suiv.) est très-significatif. Les « frères » y sont rattachés immédiatement à la « mère ». L’anecdote (Marc, iii, 41 et suiv, ; Matth., xii, 46 et suiv.) prête encore moins à l’équivoque. Enfin, toute la tradition hiérosolymitaine distingue parfaitement les « frères du Seigneur » de la famille de Clopas. Siméon, fils de Clopas, le second évêque de Jérusalem, est appelé ἀνεψιὸς τοῦ σωτῆρος[2]. Pas un seul des ἀδελφοὶ τοῦ κυρίου ne porte après son nom l’addition τοῦ Κλωπᾶ. Notoirement, Jacques, frère du Seigneur, n’était pas fils de Clopas[3] ; s’il l’avait été, il eût été aussi frère de Siméon, son successeur ; or Hégésippe ne le croyait pas ; qu’on lise les chapitres xi, xxxii du troisième livre de l’Histoire ecclésiastique d’Eusèbe, on s’en convaincra. La chronologie ne permet pas non plus de le supposer. Siméon mourut très-vieux sous Trajan ; Jacques mourut en l’an 62, fort âgé aussi[4]. La différence d’âge entre les deux frères eût donc été de quarante ans environ. Donc le système qui voit les ἀδελφοὶ τοῦ κυρίου dans les fils de Clopas est inadmissible. Ajoutons que, dans l’Évangile des Hébreux, qui a si souvent la supériorité sur les autres textes

  1. Voir Vie de Jésus, p. 25-26.
  2. Eus., H. E., III, 11, d’après Hégésippe.
  3. Dans l’Évangile de la Nativité de Marie, prol., il est expressément appelé « fils de Joseph ».
  4. Voir l’Antechrist, p. 67 ; ci-dessus, p. 54, note.