Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/319

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tiens, que, même sous ce règne, on a le regret de trouver beaucoup de martyrs. Polycarpe et Justin sont les plus illustres ; ils ne furent pas les seuls. L’Asie Mineure fut ensanglantée de meurtres juridiques très-nombreux, tous provoqués par des émeutes ; nous verrons le montanisme[1] naître comme une hallucination de cette ivresse du martyre. À Rome, le livre du faux Hermas nous apparaîtra comme sortant d’un bain de sang[2]. La préoccupation du martyre, les questions relatives aux renégats ou à ceux qui avaient montré quelque faiblesse, remplissent le livre tout entier[3]. Justin[4] nous décrit à chaque page les chrétiens comme des victimes qui n’attendent que la mort ; leur nom seul, comme du temps de Pline, est un crime. « Juifs et païens nous persécutent de tous les côtés ; ils nous privent de nos biens et ne nous laissent la vie que quand ils ne peuvent nous l’ôter. On nous coupe la tête, on nous attache à des croix, on nous expose aux bêtes, on nous tourmente par les chaînes, par le feu, par les supplices les plus horribles. Mais plus on nous fait souffrir de maux, plus on voit se multiplier le nombre

  1. Eusèbe, H. E., IV, 12, 13.
  2. Comp. II Clem., 4, 5, 7, 10, 17.
  3. Voir surtout Sim. ix, 28, etc.
  4. Voir, par exemple, Apol. I, 39 ; Dial., 39, 110, 131 ; Apol. II, 12. Comparez Lucien, Peregr., 12, 13.