Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/104

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président, des « anciens, » un hazzan, lecteur attitré ou appariteur, des « envoyés, » sortes de secrétaires ou de messagers qui faisaient la correspondance d’une synagogue à l’autre, un schammasch ou sacristain. Les synagogues étaient ainsi de vraies petites républiques indépendantes ; elles avaient une juridiction étendue. Comme toutes les corporations municipales jusqu’à une époque avancée de l’empire romain, elles faisaient des décrets honorifiques, votaient des résolutions ayant force de loi pour la communauté, prononçaient des peines corporelles dont l’exécuteur ordinaire était le hazzan.

Avec l’extrême activité d’esprit qui a toujours caractérisé les Juifs, une telle institution, malgré les rigueurs arbitraires qu’elle comportait, ne pouvait manquer de donner lieu à des discussions très-animées. Grâce aux synagogues, le judaïsme put traverser intact dix-huit siècles de persécution. C’étaient comme autant de petits mondes à part, où l’esprit national se conservait, et qui offraient aux luttes intestines des champs tout préparés. Il s’y dépensait une somme énorme de passion. Les querelles de préséance y étaient vives. Avoir un fauteuil d’honneur au premier rang était la récompense d’une haute piété, ou le privilége de la richesse qu’on enviait le plus. D’un autre côté, la liberté, laissée à qui la voulait prendre, de s’instituer lecteur et commentateur du texte sacré donnait des facilités merveilleuses pour la propagation des nouveautés. Ce fut là une des grandes