Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/130

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sectes juives fondées sur la vie cénobitique. Un élément communiste entrait dans toutes ces sectes, également mal vues des pharisiens et des sadducéens. Le messianisme, tout politique chez les Juifs orthodoxes, devenait chez elles tout social. Par une existence douce, réglée, contemplative, laissant sa part à la liberté de l’individu, ces petites Églises croyaient inaugurer sur la terre le royaume céleste. Des utopies de vie bienheureuse, fondées sur la fraternité des hommes et le culte pur du vrai Dieu, préoccupaient les âmes élevées et produisaient de toutes parts des essais hardis, sincères, mais de peu d’avenir.

Jésus, dont les rapports avec les esséniens sont très-difficiles à préciser (les ressemblances, en histoire, n’impliquant pas toujours des rapports), était ici certainement leur frère. La communauté des biens fut quelque temps de règle dans la société nouvelle. L’avarice était le péché capital ; or, il faut bien remarquer que le péché « d’avarice, » contre lequel la morale chrétienne a été si sévère, était alors le simple attachement à la propriété. La première condition pour être disciple de Jésus était de réaliser sa fortune et d’en donner le prix aux pauvres. Ceux qui reculaient devant cette extrémité n’entraient pas dans la communauté. Jésus répétait souvent que celui qui a trouvé le royaume de Dieu doit l’acheter au prix de tous ses biens, et qu’en cela il fait encore un marché avantageux. « L’homme qui a