Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/235

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

genre particulier de méchanceté dédaigneuse et sournoise qui caractérise la politique juive. Aussi est-ce sur Hanan et les siens que doit peser la responsabilité de tous les actes qui vont suivre. Ce fut Hanan (ou, si l’on veut, le parti qu’il représentait) qui tua Jésus. Hanan fut l’acteur principal dans ce drame terrible, et, bien plus que Pilate, il aurait dû porter le poids des malédictions de l’humanité.

C’est dans la bouche de Caïphe que l’évangéliste tient à placer le mot décisif qui amena la sentence de mort de Jésus. On supposait que le grand prêtre possédait un certain don de prophétie ; le mot devint ainsi pour la communauté chrétienne un oracle plein de sens profonds. Mais un tel mot, quel que soit celui qui l’ait prononcé, fut la pensée de tout le parti sacerdotal. Ce parti était fort opposé aux séditions populaires. Il cherchait à arrêter les enthousiastes religieux, prévoyant avec raison que, par leurs prédications exaltées, ils amèneraient la ruine totale de la nation. Bien que l’agitation provoquée par Jésus n’eût rien de temporel, les prêtres virent comme conséquence dernière de cette agitation une aggravation du joug romain et le renversement du temple, source de leurs richesses et de leurs honneurs. Certes, les causes qui devaient amener, trente-sept ans plus tard, la ruine de Jérusalem étaient ailleurs que dans le christianisme naissant. Elles étaient dans Jérusalem même, et non en Galilée. Cependant on ne peut dire