C’est renverser l’ordre public. Et puis, quel est ce Christus, qui joue là un rôle si étrange ? Ces gens sont dangereux. J’en parlerai à Néron. » Certes, si les esclaves, prenant à la lettre et comme immédiatement applicable la parole de saint Paul, avaient établi leur domination sur les ruines fumantes de Rome et de l’Italie et privé le monde des bienfaits qu’il devait retirer de la domination romaine, Sénèque aurait eu quelque raison. Mais si un esclave chrétien eût dit au philosophe : « O Annæus, je connais l’homme qui a écrit ces paroles ; il ne prêche que soumission et patience. Ce qu’il a écrit s’accomplira, sans révolte et par les maîtres eux-mêmes. Un jour viendra où la société sera possible sans esclave, bien que vous, philosophe, ne puissiez l’imaginer, Sénèque n’aurait pas cru sans doute ; peut-être pourtant aurait-il consenti à ne pas faire battre de verges cet innocent rêveur.
Le socialisme a donc raison, en ce qu’il voit le problème ; mais il le résout mal, ou plutôt le problème n’est pas encore possible à résoudre. La liberté individuelle, en effet, est la première cause du mal. Or, l’émancipation de l’individu est conquise, définitivement conquise, et doit être conservée à jamais. « La société, disait Enfantin, ne se compose que d’oisifs et de travailleurs ; la politique doit avoir pour but l’amélioration morale, physique et intellectuelle du sort des travailleurs et la déchéance progressive des oisifs. » Voilà un problème nettement défini. Écoutez maintenant la solution : « Les moyens sont, quant aux oisifs, la destruction de tous les privilèges de naissance, et, quant aux travailleurs, le classement selon les capacités et la rétribution selon les œuvres. » Voilà un remède pire que le mal. Il est dans la nécessité de l’esprit humain que, lorsqu’un problème est ainsi posé pour la