Page:Renan - Lettres intimes 1842-1845, calmann-levy, 1896.djvu/344

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contact parfait s’opéra entre nous. C’est un homme fort instruit et fort distingué ; il m’a pris en singulière affection et me traite sur un ton dont je ne reviens pas. C’est d’autant plus bizarre que je n’ai jamais vu la confiance expansive s’établir entre un autre et moi qu’après un long commerce, pendant lequel nous nous explorions à distance. J’ai été franc et net ; et, remarque-le bien, car ceci est capital, ce n’est pas à titre d’ecclésiastique que je suis reçu dans la maison, ce n’est point une faveur que j’y reçois comme tel. Je me serais fait une délicatesse d’accepter encore une faveur à ce titre. J’y porterai l’habit ordinaire de tout le monde, et ceux-là seuls à qui je voudrai en faire part sauront ce que j’ai été.

Que je te dise maintenant un mot de cette délicieuse visite que j’ai faite hier soir à mademoiselle Ulliac. O ma bonne amie, qu’elle m’a ravi ! J’ai trouvé un idéal d’une beauté, d’une pureté délicieuses, dans la vie extérieurement si simple de cette âme si belle et si élevée avec sa mère. Cela m’a rappelé ma pauvre maman : j’ai failli en pleurer. Oui, cette visite fera époque dans ma vie. Elle m’a