Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/12

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ne s’aidèrent réciproquement ; mais le triomphe du christianisme n’est explicable que quand on s’est bien rendu compte de ce qu’il y eut dans la tentative philosophique de force et d’insuffisance. Marc-Aurèle est à cet égard le sujet d’étude auquel il faut sans cesse revenir. Il résume tout ce qu’il y eut de bon dans le monde antique, et il offre à la critique cet avantage de se présenter à elle sans voile, grâce à un écrit intime d’une sincérité et d’une authenticité incontestées.

Plus que jamais je pense que la période des origines, l’embryogénie du christianisme, si l’on peut s’exprimer ainsi, finit vers la mort de Marc-Aurèle, en 180. À cette date, l’enfant a tous ses organes ; il est détaché de sa mère ; il vivra désormais de sa vie propre. La mort de Marc-Aurèle peut d’ailleurs être considérée comme marquant la fin de la civilisation antique. Ce qui se fait de bien après cela ne se fait plus par le principe hellénico-romain ; le principe judéo-syrien l’emporte, et, quoique plus de cent ans doivent s’écouler avant son plein triomphe, on voit bien déjà que l’avenir est à lui. Le iiie siècle est l’agonie d’un monde qui, au iie siècle, est plein encore de vie et de force.

Loin de moi la pensée de rabaisser les temps qui suivent l’époque où j’ai dû m’arrêter. Il y a dans