Page:Renan - Marc-Aurèle et la Fin du monde antique.djvu/517

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tement. Il semble qu’un mauvais génie couve sur cette société, boit son sang et sa vie. Le christianisme prend pour lui ce qu’il y a de bon et appauvrit d’autant l’ordre civil. L’armée se meurt faute d’un bon recrutement d’officiers ; l’Église attire tout. Les éléments religieux et moraux d’un État ont une manière bien simple de punir l’État qui ne leur fait pas la place à laquelle ils croient avoir droit : c’est de se retirer sous leur tente ; car un État ne peut se passer d’eux. La société civile n’a dès lors que le rebut des âmes. La religion absorbe tout ce qu’il y a de meilleur. On se détache d’une patrie qui ne représente plus qu’un principe de force matérielle. On choisit sa patrie dans l’idéal, ou plutôt dans l’institution qui tient lieu de la cité et de la patrie écroulées. L’Église devient exclusivement le lien des âmes, et, comme elle grandit par les malheurs mêmes de la société civile, on se console aisément de ces malheurs, où il est facile de montrer une vengeance du Christ et de ses saints.

« S’il nous était permis de rendre le mal pour le mal, dit Tertullien, une seule nuit et quelques fa-

    lexandre-Sévère sont déjà tout à fait mauvais. Voir aussi la répugnante mosaïque de Caracalla, au Musée de Latran. Déjà l’arc de Septime-Sévère, qui n’est postérieur que de trente ans à celui de Marc-Aurèle, et le petit arc des Changeurs, au Vélabre, sont des ouvrages grossiers.