Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/120

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que l’un de nos amis consultait sur l’état moral du pays et sur les réformes urgentes : « Des réformes ? dit-il. Une seule serait efficace ; ce serait une inondation qui montât aussi haut que l’Etna, de façon que la Sicile fût débarrassée des Siciliens. » Ce sévère critique n’ajoutait pas ce qu’il pensait sans doute, savoir : que la Sicile fût repeuplée par des gens de sa nation. Erreur ; l’espèce humaine est un ensemble bien plus compliqué qu’on ne croit. Les dons les plus divers y sont nécessaires ; la race qui dit : « La civilisation, c’est mon œuvre ; l’esprit humain, c’est moi, » blasphème contre l’humanité.


III.

M. Bonghi décida qu’après l’achèvement des travaux du congrès, la commission nationale des antiquités visiterait toutes les grandes ruines de la Sicile, pour se bien rendre compte des points où il importe le plus d’exécuter le travail des fouilles. Il voulut faire partie lui-même de cette rapide expédition, et il y invita les savants étrangers venus au congrès. Les voyages de Montréal, de Solunto, de Cefalù, avaient pu être accomplis en une journée. Une course de dix jours fut savamment organisée pour nous montrer ensuite les grands monuments de l’antiquité qui assurent à la Sicile un rang archéologique presque égal à celui de la Grèce. Cette course a produit chez ceux qui l’ont faite une vive impression. L’infatigable activité du ministre ne laissait aucune place au repos ; pendant dix