Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/166

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les poëtes persans se multiplient ; les princes les favorisent et encouragent de toutes parts la recherche des souvenirs nationaux. Ce mouvement atteignit son plus haut période de vivacité, quand la fortune amena au pouvoir les Samanides, qui descendaient des anciens Sassanides. On vit alors un guèbre, Dakiki, chargé officiellement par le gouvernement d’écrire les anciennes fables héroïques de la nation, et des parties de ce premier essai du Livre des Rois nous ont été conservées.

Dakiki mourut n’ayant écrit que mille ou deux mille vers, et les Samanides disparurent vite. Mais leur œuvre fut continuée par les Ghaznévides, et surtout par ce Mahmoud, le souverain le plus puissant de son temps (997-1030 de Jésus-Christ), sous lequel la Perse reprit enfin sa complète indépendance dans l’islam. L’idée de réunir en un corps poétique tous les récits relatifs aux anciens rois le poursuivait ; une vaste enquête s’organisa par ses soins ; les traditions orales furent recueillies ; les vieux livres arrivèrent de toutes parts. Le roi ne s’endormait jamais sans avoir auprès de lui un conteur qui lui redisait ces merveilleuses aventures. Il s’agissait de trouver un homme capable d’en faire une œuvre durable. Mahmoud chercha longtemps : il ouvrit des concours pour la rédaction d’épisodes qu’il désignait. Il trouva enfin ce qu’il cherchait dans Aboulkasim Firdousi, natif de Thous, le plus habile poëte d’une époque où la littérature devenait trop souvent un artifice et un jeu d’esprit,

Mahmoud était musulman zélé ; mais il était avant tout iranien. Quant à Firdousi, il était à peine musulman. Le fanatisme qui l’environne l’oblige à des hommages hypocrites envers le Prophète ; il s’en acquitte aussi briève-