Page:Renan - Melanges Histoires et Voyages,Calmann,1878.djvu/494

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

468 MELANGES D’HISTOIRE.

Voltaire avait tué toute érudition par son aimable bon sens, son adorable esprit, sa facile résignation à ne pas savoir ce qui demande peine et labeur. Les libraires accueillirent avec bonheur dom Clément le jour où il vint leur annoncer l’abandon de l’ouvrage qu’ils s’étaient engagés à imprimer. Cependant, comme les articles de saint Bernard et de Pierre le Vénérable étaient faits, on les publia (1773). Ce fut le dernier adieu des savants rédacteurs à un public qui ne voulait plus de leurs judicieuses recherches. Quarante ans s’écoulèrent avant que l’on songeât de nouveau en France à ce grand monument national. On n’y pensait guère qu’en Allemagne. En 1772, le savant Ernesti écrivait à Paris pour en réclamer la suite au nom de toute l’Europe lettrée.

La louable idée de reprendre nos grandes annales littéraires vint du gouvernement impérial. Un arrêté du 27 mai 1807 ordonna de continuer l’œuvre commencée par dom Rivet, et chargea de ce soin l’Institut de France, comme la seule compagnie permanente qui pût mettre l’ouvrage au-dessus des chances d’interruption. La troisième classe de l’Institut, depuis Académie des inscriptions et belles-lettres, fut naturellement désignée pour le travail. Cette compagnie se trouva d’abord médiocrement préparée à l’ouvrage dont on la chargeait ; le treizième volume ne parut qu’en 1814. Un survivant de la congrégation de Saint-Maur que l’Académie possédait, dom Brial, fit peu de chose pour le recueil, occupé qu’il était de la collection des Historiens de la France. Le restaurateur de l’œuvre, à ce moment difficile où il s’agissait de renouer les traditions, fut Daunou. L’esprit juste et clair de cet honnête homme, ses anciennes études ecclésias-