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MADEMOISELLE RENAN


Paris, 6 juin 1848.

Je commençais à être inquiet de ton silence, excellente amie. La lettre que viont de recevoir mademoiselle Ulliac m’a rassuré. Les mois s’écoulent, sans que les événements auxquels se lie notre destinée, se tranchent d’une manière définitive. J’accorde bien, chère amie, que durant cette période d’hésitation, tu doives rester dans ta position, mais je ne doute pas en même temps que le moment ne vienne, et bientôt peut-être, où tu devras la quitter. C’est alors, excellente sœur, que je te supplie de ne plus tarder un moment. Plus j’avance, chère amie, plus je me convaincs que, même sans quitter Paris, nous pourrions trouver à vivre honorablement, surtout si j’obtenais à la fin de l’année le titre d’agrégé. Lors même qu’avec ce titre je ne pourrais obtenir immédiatement à Paris de position officielle, le traitement fixe qui y est attaché, des suppléances dans les collèges, quelques préparations pour le baccalauréat et l’école administrative, et enfin des articles donnés de temps en temps à la presse périodique pourraient, je t’assure, nous dispenser de toucher durant les premières années à notre fonds de réserve. Il ne serait là que pour parer à toute éventualité, et nous rassurer sur ce qu’une telle position aurait nécessairement