Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/312

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qui j’ai eu plusieurs fois affaire pour des articles tirés à part de la Liberté de Penser, acceptera le manuscrit à de bonnes conditions. Et dussé-je faire les avances, elles ne dépasseraient pas cinq à six cents francs, que dis-je ? peut-être pas quatre cents francs, que je serai assuré de couvrir par la vente. M. Egger, qui s’entend très bien en librairie, m’a assuré que j’en écoulerais environ cinq cents exemplaires. D’ailleurs j’envisage ce premier essai beaucoup moins comme une spéculation commerciale que comme un premier titre, une première manifestation de ma pensée intime. C’est pour cela que je désire l’émettre avant mes thèses. Ma vie ne sera jamais absorbée par l’érudition aride et sans vie. Je ne veux pas être confondu dans la foule de ces grimauds de compilateurs, qui passent leur vie sans remuer une idée. Je veux dire dès le début le sens que j’attache à la science, comment elle est à mes yeux inséparable de la philosophie, comment elle n’a de valeur que par la philosophie qu’elle renferme, comment la science est une religion, sacrée au même titre qu’elle, puisque seule elle peut résoudre à l’homme le grand problème des choses, etc. Ce sera ma profession de foi scientifique, mon Discours de la Méthode, mon Novum Organum. Je voudrais que l’effroyable réaction intellectuelle à laquelle nous sommes en proie sous ce néo-féodal M. de Falloux continuât jusqu’au moment de la publication. Cela lui donnerait un petit vernis d’opposition et d’actualité fort prisé en France, Malheureusement