Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/510

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dernière ville italienne de cette ligne : mais qu’elle est intéressante et qu’elle mérite d’être visitée ! J’ai cru un moment me retrouver en Toscane ou en Ombrie. Ici Napoléon efface tout et domine tout souvenir. Milan est sa ville ; un peu plus encore, et il l’eût faite blanche et neuve comme la rue de Rivoli. Monza même n’a pas échappé à ce replâtrage et à cette décoration théâtrale, et en vérité la couronne de fer et les curieuses reliques de Théodelinde y paraissent fort dépaysées. Il faut s’y résigner ; adieu les madones, adieu les costumes pittoresques, adieu l’art local ; en revanche, il y a des gardes nationaux d’une tournure fort amusante, et des crieurs de journaux qui vendent à toute heure l’Instituteur du peuple, l’Ami du peuple, le Conseiller du peuple, et toute chose du peuple. Ah ! que tu me fais de joie en me recommandant de ne pas dire adieu à l’Italie ! Il faudra être sage pourtant, et si une Faculté dans le midi peut s’arranger, il faudra renoncer à ce beau rêve. Mais pourquoi anticiper sur ce point, dont nous causerons à loisir ? J’ai communiqué à Daremberg les détails que tu me donnes sur ta maladie et le traitement. Tout ce qu’il me dit (et je suis assuré qu’il y met une franchise toute médicale) me rassure complètement ; le traitement lui semble tout à fait méthodique, et le séjour du midi salutaire, sinon nécessaire. Du reste il lui semble que le midi de la France suffirait. Je le crois bien aussi ; mais quant à choisir, Rome me semblerait aussi économique et mille