Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/19

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ne sera donc réimprimé qu’après ma mort. Peut-être pourra-t-on y joindre alors quelques lettres de mon amie, dont je ferai moi-même par avance le choix.

L’ordre naturel de ce livre, qui n’est autre que l’ordre même des périodes diverses de ma vie, amène une sorte de contraste entre les récits de Bretagne et ceux du séminaire, ces derniers étant tout entiers remplis par une lutte sombre, pleine de raisonnements et d’âpre scolastique, tandis que les souvenirs de mes premières années ne présentent guère que des impressions de sensibilité enfantine, de candeur, d’innocence et d’amour. Cette opposition n’a rien qui doive surprendre. Presque tous nous sommes doubles. Plus l’homme se développe par la tête, plus il rêve le pôle contraire, c’est-à-dire l’irrationnel, le repos dans la complète ignorance, la femme qui n’est que femme, l’être instinctif qui n’agit que par