Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/191

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l’occasion de placer devant moi son mot favori : « Un âne chargé de latin ! » Plus tard, lors de la publication de mes premiers écrits, il triompha. Je me reproche quelquefois d’avoir contribué au triomphe de M. Homais sur son curé. Que voulez-vous ? C’est M. Homais qui a raison. Sans M. Homais, nous serions tous brûlés vifs. Mais, je le répète, quand on s’est donné bien du mal pour trouver la vérité, il en coûte d’avouer que ce sont les frivoles, ceux qui sont bien résolus à ne lire jamais saint Augustin ou saint Thomas d’Aquin, qui sont les vrais sages. Gavroche et M. Homais arrivant d’emblée et avec si peu de peine au dernier mot de la philosophie ! C’est bien dur à penser.

Mon jeune compatriote et ami, M. Quellien, poète breton d’une verve si originale, le seul homme de notre temps chez lequel j’aie trouvé la faculté de créer des mythes, a rendu ce tour de ma destinée par une fiction très ingénieuse. Il prétend que mon âme habitera, après ma mort, sous la forme d’une mouette blanche, autour de l’église ruinée de Saint-