Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/289

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par des réflexions judicieuses ou piquantes. Je lui lus de la sorte les longues histoires du père Maimbourg, écrivain maintenant oublié, mais qui fut en son temps estimé de Voltaire ; diverses publications de M. Benjamin Guérard, dont la science le frappait beaucoup ; quelques ouvrages de M. de Maistre, en particulier sa Lettre sur l’inquisition espagnole. ce dernier opuscule ne lui plut guère. A chaque instant, il me disait en se frottant les mains : « Oh ! comme on voit bien, mon cher, que M. de Maistre n’est pas théologien ! » Il n’estimait que la théologie, et avait un profond mépris pour la littérature. Il perdait peu d’occasions de traiter de fadaises et de futilités les études si estimées des nicolaïtes. M. Dupanloup, dont le premier dogme était que sans une bonne éducation littéraire on ne peut être sauvé, lui était peu sympathique. Il évitait en général de prononcer son nom.

Pour moi, qui crois que la meilleure manière de former des jeunes gens de talent est de ne jamais leur parler de talent ni de style,