Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/327

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possible mes études d’exégèse et de philologie sémitique m’obligea d’apprendre l’allemand. Je n’avais à cet égard aucune préparation ; à Saint-Nicolas, mon éducation avait été toute latine et française. Je ne m’en plains pas. L’homme ne doit savoir littérairement que deux langues, le latin et la sienne ; mais il doit comprendre toutes celles dont il a besoin pour ses affaires ou son instruction. Un bon condisciple alsacien, M. Kl…, dont je vois souvent le nom cité pour les services qu’il rend à ses compatriotes à Paris, voulut bien me faciliter les débuts. La littérature était pour moi chose si secondaire, au milieu de l’enquête ardente qui m’absorbait, que j’y fis d’abord peu d’attention. Je sentis cependant un génie nouveau, fort différent de celui de notre XVIIe siècle. Je l’admirai d’autant plus que je n’en voyais pas les limites. L’esprit particulier de l’Allemagne, à la fin du dernier siècle et dans la première moitié de celui-ci, me frappa ; je crus entrer dans un temple. C’était bien là ce que je cherchais, la conciliation d’un esprit hautement religieux avec