Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/83

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soins ; le soupçon se porta donc sur elle. C’était une excellente femme, sa culpabilité paraissait souverainement invraisemblable ; mais que faire contre des coïncidences accablantes ? On ne sortait pas de ce raisonnement : « Le voleur est entré par la porte de la sacristie ; or la sacristine seule a pu passer par cette porte, et il est prouvé qu’elle y a passé en réalité ; elle-même l’avoue. » On cédait trop alors à l’idée qu’il était bon que tout crime fût suivi d’une arrestation. Cela donnait une haute idée de la sagacité extraordinaire de la justice, de la promptitude de son coup d’œil, de la sûreté avec laquelle elle saisissait la piste d’un crime. On emmena l’innocente femme à pied entre les gendarmes. L’effet de la gendarmerie, quand elle arrivait dans un village, avec ses armes luisantes et ses belles buffleteries, était immense. Tout le monde pleurait ; la sacristine seule restait calme et disait à tous qu’elle était certaine que son innocence éclaterait.

» Effectivement, dès le lendemain ou le surlendemain, on reconnut l’impossibilité de