Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/236

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C’était plus qu’il n’en fallait pour décider celui-ci à donner suite à ses soupçons. Il fit arrêter le baptiste et donna ordre de l’enfermer dans la forteresse de Machéro, dont il s’était probablement emparé après le départ de la fille de Hâreth[1].

Plus timide que cruel, Antipas ne désirait pas le mettre à mort. Selon certains bruits, il craignait une sédition populaire[2]. Selon une autre version[3], il aurait pris plaisir à écouter le prisonnier, et ces entretiens l’auraient jeté dans de grandes perplexités. Ce qu’il y a de certain, c’est que la détention se prolongea et que Jean conserva du fond de sa prison une liberté d’action étendue[4]. Il correspondait avec ses disciples, et nous le retrouverons encore en rapport avec Jésus. Sa foi dans la prochaine venue du Messie ne fit que s’affermir ; il suivait avec attention les mouvements du dehors, et cherchait à y découvrir les signes favorables à l’accomplissement des espérances dont il se nourrissait.

  1. Jos., Ant., XVIII, v, 2.
  2. Matth., xiv, 5.
  3. Marc, vi, 20. Je lis ἠπόρει, et non ἐποίει. Cf. Luc, ix, 7.
  4. La prison en Orient n’a rien de cellulaire : le patient, les pieds retenus par des ceps, est gardé à vue dans une cour ou dans des pièces ouvertes, et cause avec tous les passants.