Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/275

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dans ces petits comités de bonnes gens, plus de créance que partout ailleurs. Rien de ce qu’on appelle civilisation, dans le sens grec et mondain, n’avait pénétré parmi eux. Ce n’était pas notre sérieux germanique et celtique ; mais, bien que souvent peut-être la bonté fût chez eux superficielle et sans profondeur, leurs mœurs étaient tranquilles, et ils avaient quelque chose d’intelligent et de fin. On peut se les figurer comme assez analogues aux meilleures populations du Liban, mais avec le don que n’ont pas celles-ci de fournir des grands hommes. Jésus rencontra là sa vraie famille. Il s’y installa comme un des leurs ; Capharnahum devint « sa ville[1] », et, au milieu du petit cercle qui l’adorait, il oublia ses frères sceptiques, l’ingrate Nazareth et sa moqueuse incrédulité.

Une maison surtout, à Capharnahum, lui offrit un asile agréable et des disciples dévoués. C’était celle de deux frères, tous deux fils d’un certain Jonas, qui probablement était mort à l’époque où Jésus vint se fixer sur les bords du lac. Ces deux frères étaient Simon, surnommé en syro-chaldaïque Céphas, en grec Pétros « la pierre[2] », et André. Nés à Beth-

  1. Matth., ix, 1 ; Marc, ii, 1-2.
  2. Le surnom de Κηφᾶς paraît identique au surnom de Καϊάφας porté par le grand prêtre Josèphe Kaïapha. Le nom de Πέτρος se