Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/637

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des Hellènes qui s’adressent à Philippe. Remarquez le rôle de cet apôtre ; notre Évangile est le seul qui en sache quelque chose. Remarquez surtout combien tout ce passage est exempt d’intention dogmatique ou symbolique. Dire que ces Grecs sont des êtres de raison comme Nicodème et la Samaritaine, est bien gratuit. Le discours qu’ils amènent (v. 23 et suiv.) n’a aucun rapport avec eux.

L’aphorisme du v. 25 se retrouve dans les synoptiques ; il est évidemment authentique. Notre auteur ne le copie pas dans les synoptiques. Donc, même quand il fait parler Jésus, l’auteur du quatrième Évangile suit parfois une tradition.

§ 27. Les versets 27 et suiv. ont beaucoup d’importance. Jésus est troublé. Il prie son Père « de le délivrer de cette heure ». Puis il se résigne. Une voix se fait entendre du ciel, ou bien, selon d’autres, un ange parle à Jésus. Qu’est-ce que cet épisode ? N’en doutons pas, c’est le parallèle de l’agonie de Gethsémani, qui, en effet, est omise par notre auteur à la place où elle aurait dû se trouver, après la dernière cène. Remarquez la circonstance de l’apparition de l’ange, que Luc seul connaît ; trait de plus à ajouter à la série de ces concordances entre le troisième Évangile et le quatrième qui sont un fait si important de la critique évangélique. Mais l’existence de deux versions si différentes d’une circonstance des derniers jours de Jésus, qui certainement est historique, sont un fait bien plus décisif encore. Qui mérite ici la préférence ? Le quatrième Évangile, selon moi. D’abord, le récit de cet Évangile est moins dramatique, moins disposé, moins agencé (moins beau, je l’avoue). En second lieu, le moment où le quatrième évangéliste place l’épisode en question est bien plus convenable. Les synoptiques ont rapporté la scène de Geth-