Page:Renard - Bucoliques, 1905.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
123
BUCOLIQUES

Puis, d’un coup de truelle, il flanque une première gifle de mortier au mur. Vite il la ramasse et de nouveau en frappe le mur. Avec plus de soin, il la ramasse encore pour l’appliquer au même endroit. C’est maintenant une succession de gifles rapides qui diminuent chaque fois, marquent et sonnent de moins en moins, jusqu’à la dernière, petite chiquenaude donnée d’un geste machinal, qui colle sans éclat et reste. L’homme est là depuis cinq heures du matin. Il ne s’en ira qu’à sept heures du soir. Et il ne perdra rien de sa journée. Il fera le jardinier, il se plantera, pour sa consommation personnelle, des pois jusqu’à ce que dans la nuit noire, il ne distingue plus ses pieds de la terre.

Ah ! j’ai bel air, les mains dans mes poches, une fleur aux lèvres, à le regarder. Sans doute, je risque de recevoir au nez un peu de ciment. C’est crâne !

Espèce de fainéant, saute donc sur une pioche, rends-toi utile, tâche de suer, au moins pour ta santé, coupe la mauvaise