homme : ceux-là sont gentils de venir chez moi !
Il ouvrit la barrière et s’avança à petits pas comme quelqu’un qui porte un bol de lait.
L’un des soldats dressa la tête et dit :
— Vesse ! un vieux ! Il n’a pas l’air content. Quoi ? Qu’est-ce qu’il raconte ? entends-tu, toi ?
— Non, dit l’autre.
Ils écoutèrent, indécis. Le vent ne leur apportait aucun son. En effet, le vieillard ne parlait pas. Il continuait de s’attendrir, et, marchant doucement vers eux, pensait :
— Bien ! mes enfants ! Tout ce qui est ici vous appartient. Vous serez surpris, quand je vous prouverai, filet en main, qu’il y a dans ce ruisseau, au pied de ce grand saule âgé de six ans à peine, des brochets comme ma cuisse. Je les y ai mis moi-même. Nous en ferons cuire un. Mais laissez donc votre linge, ma femme vous lavera ça !
Ainsi pensait le vieil homme, mais sa tête oscillante le trahissait, effarouchait, et les soldats, déjà inquiets, sachant à fond leur civil, comprirent :