Page:Renard - Coquecigrues, 1893.djvu/52

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On ne lui répondit même pas. Il s’éloigna à reculons, confus, certain qu’il les avait fâchés, et se promettant de faire oublier sa conduite par des amabilités de son ressort.

— Imbécile ! dit M. Bornet. Des gens qui crèvent de faim. Dernièrement, leur petit tétait une feuille de salade.

— Au fond, c’est de l’orgueil, dit Mme Bornet. Il mourait d’envie d’accepter.

Elle n’en revenait plus, et ses doigts fébriles jouaient sur les petits tambourins de ses tempes. Les coudes sur la table, Monsieur consultait une manche de son paletot. En vérité, ce gâteau était d’un placement si difficile qu’ils allaient s’en désintéresser.

— Sommes-nous bêtes ! dit enfin Madame.

Elle donna un vif coup de pouce à la poire électrique.

La bonne parut.

— Louise, dit sèchement Mme Bornet, mangez ça. Vous conserverez votre fromage pour demain.

Louise emporta le gâteau.