Page:Renard - Histoires naturelles, 1909.djvu/14

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répond qu’à ses heures, et d’abord il ne répond pas.

Le coq fait le beau, gonfle ses plumes, qui ne sont pas mal, celles-ci bleues, et celles-là argentées, — mais l’autre, en plein azur, est éblouissant d’or.



Le coq rassemble ses poules, et marche à leur tête. Voyez : elles sont à lui ; toutes l’aiment et toutes le craignent, — mais l’autre est adoré des hirondelles.

Le coq se prodigue. Il pose, ça et là, ses virgules d’amour, et triomphe, d’un ton aigu, de petits riens ; — mais justement l’autre se marie et carillonne à toute volée ses noces de village.

Le coq jaloux monte sur ses ergots pour un combat suprême ; sa queue a l’air d’un pan de manteau que relève une épée. Il défie, le sang à la crête, tous les coqs du ciel, — mais l’autre, qui n’a pas peur de faire face aux vents d’orage, joue en ce moment avec la brise et tourne le dos.

Et le coq s’exaspère jusqu’à la fin du jour.

Ses poules rentrent, une à une. Il reste seul, enroué, vanné, dans la cour déjà sombre, — mais l’autre éclate encore aux derniers feux du soleil, et chante, de sa voix pure, le pacifique angélus du soir.