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Page:Renard - L’Écornifleur, Ollendorff, 1892.djvu/312

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descendant. Marguerite me rend mon baiser sur les deux joues, en camarade, en fiancée tranquille.

— « Il faut que je vous embrasse aussi, Monsieur Vernet ! »

— « Roublard ! pour embrasser ma femme ensuite ! Blanche, laisse-toi faire ! »

— « M’aimes ? » murmure-t-elle si bas que je devine le mot à peine distinct de son haleine, et je souffle entre mes dents :

— « Oui ! »

— « Messieurs les voyageurs, en voiture ! » crie l’employé, qui donne toute sa voix en notre honneur.

Par la portière, que Monsieur Vernet tient à fermer lui-même, nous échangeons de longs regards. Marguerite est rose, Madame Vernet un peu pâle. Monsieur Vernet, avec une amabilité inlassable, me répète que j’arriverai à Paris à minuit et quart, et me blâme de n’avoir pas emporté un petit pain.

Des souhaits pour le voyage, des serrements de mains et ces regards si longs ! si doux ! puis un sifflement, un ébranlement, une agitation de têtes et de mouchoirs : une immense tristesse !