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Page:Renard - La Lanterne sourde, Coquecigrues,1906.djvu/323

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LA LOUPE


Ce soir, Éloi est allé dans le monde. Il se promène sous les lustres, salue quelques invités et trouve enfin le sujet qu’il cherchait pour son expérience : il retient longuement dans sa main la main d’une femme.

— Quelle peau fine vous avez, chère Madame ! vous devez en être fière, dit-il.

À ces mots, il tire de sa poche une loupe :

— Regardez plutôt.

Le verre appliqué, on voit des ornières profondes, des grains pareils aux pierres de la route, des veines navigables, des poils oubliés comme de mauvaises herbes, de sombres taches ici, là un point qui bouge, une petite bête sans doute, et partout des horreurs.

Éloi se garde de faire une réflexion blessante.

Il ne dit rien. Il remet la loupe dans sa poche, presse une dernière fois cette main de femme, discrètement, et s’éloigne.

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