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LA GERBE


Éloi voit, au milieu d’un champ, le mauvais fermier qui chasse durement une pauvre femme. Il s’approche et demande ce qu’elle a fait.

— La vieille ne se gêne pas, dit le fermier ; pour glaner plus vite, elle vole des épis dans mes gerbes.

— N’est-ce que cela ? dit Éloi ; voici cinq francs : donnez-moi une de vos gerbes.

Le fermier interloqué tarde à répondre, tourne la pièce et dit :

— Vous voulez rire !

Mais déjà Éloi s’est emparé de la gerbe. Il la délie. Il prend une brassée d’épis et la jette au loin. Il en porte une seconde ailleurs et la secoue. Il revient et continue avec hâte d’écarter la gerbe.

Puis, quand il l’a répandue tout entière par le champ moissonné, il pousse du bout du doigt la pauvre femme :

— Maintenant, glanez, lui dit-il.

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