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Page:Renard - Le Docteur Lerne sous-dieu, 1908.djvu/192

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le docteur lerne, sous-dieu

« À mon sens, pensai-je, la folie de Mac-Bell provient de ceci : que Lerne l’a manqué, de ceci : que le malheureux a vu la mort épouvantable s’approcher, fondre sur lui… Mais, au fait, pourquoi mon oncle l’a-t-il manqué ?… Sans doute, en plein travail funèbre — qu’il attaqua sans réfléchir, guidé par sa fureur aveugle et l’amour aux yeux bandés — a-t-il vu clair subitement, et redouté les représailles de la famille Mac-Bell… Klotz, lui, était orphelin et célibataire, Emma l’affirme, — aussi le voilà !… Et c’est le même sort qui m’attend ! qui l’attend peut-être, elle, si l’on nous trouve ensemble !… Ah, fuir ! fuir à tout prix, elle et moi ! fuir, c’est la seule chose raisonnable ! Justement l’occasion nous favorise. Se représentera-t-elle jamais ? Il nous faut partir et gagner la station à travers la forêt pour éviter Lerne et Karl en train de revenir par le chemin droit. Mais le labyrinthe ?… Serait-il préférable d’utiliser l’automobile et de leur passer sur le corps ? Je ne sais… nous verrons bien… Arriverai-je à temps ? Vite, pour Dieu, vite ! »

Je courais à perdre haleine, luttant de vitesse avec la Camarde rapide, légère, invisible ; je courais, deux fois tombé, deux fois relevé, râlant la terreur d’en être distancé…

Le château ! — Pas de Lerne encore ; son feutre n’était pas accroché à la patère habituelle dans le vestibule. J’avais gagné la première manche. La deuxième consistait à nous évader avant son retour.