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Page:Renard - Le Docteur Lerne sous-dieu, 1908.djvu/239

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le docteur lerne, sous-dieu

Ma démence s’évapora. Les étoiles s’éteignirent. Tout reparut :

La belle fille, sortie de son coma luxurieux, assise à terre, clignait des cils et ne comprenait rien. Les aides me guettaient, chacun derrière un arbre ; et Lerne, penché sur mon ancien corps inerte et disloqué, lui soulevait la tête où saignait un grand trou.

Et c’était moi — moi ! — qui avais commis la sottise sans nom de me détériorer moi-même !…

Le professeur, ayant palpé de toutes parts le blessé, formula son diagnostic :

— Un bras démis ; trois côtes rompues ; fracture de la clavicule et du tibia gauches : on en revient. Mais le coup de corne à la tête, c’est plus sérieux… Hum ! la cervelle est en capilotade. Il est fichu. Rien ne l’en tirera. Dans une demi-heure : finita la comedia !…

Je dus m’épauler contre un arbre pour ne point m’abattre. Ainsi, mon corps, ma patrie des patries, allait mourir ! C’était fini… À tout jamais banni de ma demeure anéantie, j’avais supprimé la première condition de ma délivrance. C’était fini… Lerne lui-même n’y pouvait rien, il l’avait confessé… Une demi-heure !… La cervelle en capilotade !… Mais… mais, cette cervelle… Il pouvait…

Il pouvait tout, au contraire !

Je m’approchai de lui. Ma suprême chance allait se jouer.