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le péril bleu

famille animale. C’est que les Sarvants s’imaginent que le costume est un pelage, lequel pelage marque autant de variétés dans l’espèce qu’il offre lui-même de modalités. Un fait le corrobore : c’est, ici, la grande quantité et la grande diversité des bêtes de même race, mais à fourrures ou à plumages différents, comme lapins, canards, etc… Les Sarvants — aristocrates à leur façon — croient que la redingote est d’une autre engeance que la blouse. Et ceci donne gain de cause au système que j’avais adopté : de me vêtir comme l’un des disparus, afin d’échapper au Péril Bleu. Mme Le Tellier ne fut dédaignée par les Sarvants qu’en raison de cela ; sous la charmille, ils se sont souvenus qu’ils possédaient déjà, de la classe dressée et de la sous-classe à pattes inférieures adhérentes, un spécimen à corps noir et à crinière jaune ; et ils l’ont lâchée, au lieu de l’emporter avec Maxime et ce veau qu’ils venaient de confisquer dans le voisinage…

On pourrait en conclure que tous les Sarvants se ressemblent et qu’ils vont nus.

§ Tout à l’heure, l’Anglais mon voisin fut pris de syncope. Il a donné tous les signes d’un être placé sous la cloche d’une machine pneumatique ; puis les sens lui sont revenus peu à peu. Mais les parois de sa cellule ne se sont pas doublées de givre ; par conséquent la pression avait faibli sans que la température eût baissé. Serait-ce une expérience ? — Je n’aime pas cela.

« Cellule » ai-je écrit ; il faudrait dire « cabanon ». Mon voisin est fou. Et que d’autres aussi !

§ Bonheur ! Bonheur ! Bonheur ! Il me semble bien avoir aperçu, tout là-bas, certaine robe grise… — Et non loin d’elle, j’ai reconnu Henri Monbardeau, mais avec peine. Dans quel état de maigreur !…

7 juillet.

C’est donc toujours la nuit qu’on nous apporte à