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Page:Renard - Le Péril Bleu, 1911.djvu/318

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la vérité sur les sarvants

— « Passez-moi le scalpel », dit Courtois. « Cette cohésion me paraît bizarre… »

— « Vous avez du nouveau ? » lui demanda M. Le Tellier.

M. Courtois. — Attendez, laissez-moi faire… — C’est bien cela ! Je m’y attendais. Oh !… Ces araignées… elles ne sont pas seulement unies par l’enlacement de leurs pattes. Elle se tiennent aussi par les nerfs. Chacune présente deux papilles nerveuses extérieures, en relation avec les centres (cerveau, moelle ou ganglions) et qui remplissent la fonction de plots électriques, ou de prises de courant, comme vous voudrez. Les araignées se branchent l’une après l’autre, au moyen de ces contacts nerveux !

M. Le Tellier. — Terre et ciel ! Mais alors, si elles peuvent se souder de la sorte, l’espèce arachnéenne tout entière peut, à sa guise, former une quantité variable d’êtres collectifs, ou devenir un seul animal immense, doué d’un seul esprit, d’une seule volonté, d’une seule sensibilité, — une boule gigantesque, ou bien un cordon interminable, un chapelet…

M. Monbardeau. — Comme le tænia ! qui lui aussi est composé d’organismes bout à bout…

M. d’Agnès. — Les Sarvants ressemblent à l’eau, qui s’éparpille en gouttelettes sans nombre et pourrait ne former qu’un seul océan. Docteur, nous ne sommes plus des cachalots ; ces gens-là sont des Titans, lorsqu’ils le veulent.

M. Courtois. — Oui : des Titans ! des Protées multiformes ! Il a plu à ceux-ci d’emprunter notre stature pour essayer de nous tromper ; ils avaient le choix entre toutes les conformations possibles, ils pouvaient s’amalgamer dans toutes les combinaisons plastiques, et devenir ainsi plusieurs grandes créatures-colonies, beaucoup de petits êtres-sociétés, ou bien rester une foule d’individus séparés.

M. Le Tellier. — Ces araignées ne sont, en somme, que des unités de construction, — telles les cellules de notre corps, puisque, après tout, l’homme n’est aussi qu’une collection d’éléments. La différence, c’est que