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le péril bleu

— « L’aérarium est là ! » dit M. Le Tellier en se redressant, « ou plutôt les choses qui le rendaient visible. Cette nuit, c’étaient des nuages de terre qui tombaient ; les Sarvants l’ont jetée wagon par wagon. Ils se sont débarrassés de leur muséum d’océanographie ! »

Des faces blêmes l’entouraient.

— « Et les… les êtres ? » demanda Mme Arquedouve. «  Les seize prisonniers ? »

— « Henri ? »

— « Suzanne ? »

— « Marie-Thérèse ? »

— « Fabienne ? »

— « Il n’y a rien de vivant là-bas. Rien de mort non plus… Et là-haut il n’y a plus rien du tout. »

— « Les Sarvants les ont entraînés sur un autre point de leur globe ! »

— « Ne dis pas cela, Maxime ! » s’écria Mme Le Tellier qui tremblait de tous ses membres. « Je t’en supplie ! Pas cela ! »

— « Mais qu’espérez-vous donc, maman ? »

— « Est-ce que je sais !… »

Maxime s’était emparé du télescope. Il considérait les monticules. On se taisait.

À ce moment, très, très loin, parmi toutes les rumeurs de l’éveil auroral, un chien jappait.

Mme Arquedouve prêta l’oreille.

Le jappement se rapprochait.

L’aveugle comprima son cœur à deux mains. Les autres la regardaient curieusement. Elle écoutait le chien comme elle eût admiré la splendeur de la lumière reconquise. Oppressée, elle ne pouvait rien dire de son émoi.

— « Mère, mère, » chuchota Mme Le Tellier, « est-ce vraiment Floflo qui revient ? »

Mme Arquedouve abaissa les paupières. Et chacun s’interrogeait du regard. Floflo ? Floflo que Robert, que Maxime avaient vu chez les Sarvants ! Floflo vivant ! Floflo de retour ?… La grand’mère se trompait !…

C’était bien lui pourtant.

Il arriva, tirant une langue interminable et rose, sautant de joie malgré sa fatigue, léchant les mains, les visages et même les bottines. Mais ce qu’il était décharné,