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NOUVELLES DU PAYS

montrer, aujourd’hui comme hier, les qualités de l’âne. S’ils sont sobres et laborieux, ils peuvent faire leur vie et se mettre de côté, pour les vieux jours, du pain sec.

— C’est maigre.

— On ne meurt pas de faim, dit Philippe.

— On en meurt moins vite. Ne pensez-vous pas, Philippe, que le mal vient de ce que les uns ont trop et les autres trop peu ?

— Il faut bien qu’il y ait des riches.

— Pourquoi, Philippe ?

— Parce qu’il y en a toujours eu.

— Pourquoi ne serait-ce pas votre tour d’être riche ? Vos pères étaient pauvres, vous êtes pauvre, et vos fils et les fils de vos fils seront pauvres. Pourquoi ?

— Parce que c’est arrangé comme ça.

— Ce serait autrement, si le hasard l’avait voulu.

— Il n’a pas voulu.

— Contre une telle injustice, vous avez le droit de réclamer.

— On me recevrait !