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UN GENTILHOMME PHYSICIEN

avec des partisans, qui venait narguer le prolétaire ? Quels aristos impertinents allaient descendre de la machine ?

Une trombe poudreuse approchait. La foule se dissimulait à elle-même la venue des quatre voyageurs. On s’étonna d’une marche aussi muette : le moteur, autrefois, crépitait. On s’étonna d’une course aussi rapide : autrefois… Mais… Ha !…

Tout s’éclaira dans les cerveaux, avec brusquerie. L’automobile chargeait la multitude !

Il y eut un mouvement convulsif de la grand’rue, le tassement prompt de l’assemblée, de-ci de-là, pour former la haie. En un clin d’œil, un chemin creux s’ouvrit à travers la matière humaine comprimée. Quoi qu’elle en eût, elle faisait passage au train seigneurial, comme au temps jadis où les carrosses retentissants cahotaient sur le pavé du Roi. Gare ! Gare ! Place ! Rangez-vous !

L’automobile s’engouffra dans l’espace vide. Un météore ! Et pas un coup de trompe ! Pas un appel avertisseur du pilote ! Pas un geste des quatre individus masqués de lunettes et