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SOURIRES PINCÉS

5

Afin de juger sainement d’un livre, essayez de vous faire les ongles en le lisant. Si vous n’y parvenez pas, le livre est, bon, et, si vous vous êtes un peu coupé, il est excellent.

6

Il est des hommes de lettres qui sont les cholériques des lettres et dont le cerveau est un bas-ventre dérangé. Ils écrivent comme on a la diarrhée.

7

— Platon rapporte quelque part... me dit mon grand confrère.

Je le regarde, épouvanté. Mais mon grand confrère ajoute :

— Soyez tranquille, je ne lis pas Platon. J’ai pris cette phrase dans Caro, qui l’a prise dans Cousin, qui l’a prise dans Voltaire, qui l’a inventée de tous mots. C’est comme les proverbes, quand je ne sais pas d’où ils viennent, je dis qu’ils sont arabes !

8

Si l’on voulait assembler une riche collection de sourires, cueillerait-on le plus jaune sur les lèvres du confrère qui fait un compliment ou sur celles du confrère qui le reçoit ?

9

— Ton livre est très bien.

— Là, franchement, qu’en penses-tu ?

— Eh ! bien, mon cher, entre nous, je trouve